« Honneur et Dignité Maintenus » de la série « Émigration russe en photos, 1917-1947 » – Album II, 2001

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« Honneur et Dignité Maintenus » de la série « Émigration russe en photos, 1917-1947 »

édition YMCA-PRESS, 2001, ÉPUISÉ.

750 photos (N/B) – textes bilingue Français-Russe. 410 pp. 24 x 29 cm. 2,2kg
ISBN 2-85065-257-1 / 978-2-85065-257-8
 

Les soldats de l’Armée blanche et les philosophes expulsés de Russie en 1922, les poètes et les chauffeurs de taxi, les peintres et les ouvriers-manœuvres, les couturières et les cham-pions de sport – ils sont tous là dans cette collection. Les visages des uns sont d’une beauté merveilleuse, aux traits finement ciselés, les autres sont simples et désemparés. Ici on voit un vêtement à la couleur passée, là des uniformes de parade, des icônes, des barbes, et partout de l’espérance dans les yeux. Peu d’entre eux verront ou reverront la Russie. Peut-être ces petits garçons et ces fillettes, qui n’ont encore jamais vu leur patrie et qui l’aiment d’après des récits, contes et légendes.
Un livre poignant. Il témoigne du fait que la Russie en exil a une conscience aiguë du devoir et de la morale qui constitue son dernier refuge. Par son choix même et par la valeur combinée des photographies, l’auteur déclare que des êtres de grande valeur spirituelle, dotés d’un sens élevé de l’honneur et de la dignité, se sont trouvés en exil. Ce n’est pas un hasard si l’héritage culturel de l’émigration est d’une telle richesse et d’une telle variété. Dès les premiers jours il fut fondé sur un choix de vie décisif : il fallait quitter la maison souillée et diriger ses pas vers la Russie éternelle.

Avant-propos

Le premier volume de la collection documentaire L’Émigration russe en photos, France, 1917-1947 est paru il y a deux ans, à Paris, aux Éditions YMCA-Press. Je ne pouvais même pas imaginer le vif intérêt qu’il allait susciter. Les comptes-rendus de presse, des entretiens avec des Parisiens russes, les multiples compléments apportés par les lecteurs dans leurs lettres ou leurs conversations, tout cela m’a convaincu qu’il fallait poursuivre le travail. Parmi ces réactions, il y avait une lettre merveilleuse de l’évêque Séraphime du monastère de Lesna dans laquelle il écrivait : “ Des gens vont vous dire : pourquoi n’avez-vous pas inclus Un tel dans votre livre, pourquoi n’avez-vous pas cité tel nom, publié tel autre ? Prenez-en note et continuez votre travail, cherchez, tôt ou tard vous allez tout retrouver. ”

Et c’est vrai : on m’apporte de l’aide, on me communique des documents, des gens me téléphonent et m’invitent à venir les voir.
Des lecteurs m’ont éclairé et m’ont fourni des précisions sur des noms de famille, des personnages, des dates et des circonstances déjà évoqués dans le premier volume ; d’autres me confient de nouvelles photographies : c’est comme cela qu’ont ressurgi des images du célèbre tailleur Chalimoff grâce à sa fille Geneviève et de remarquables clichés de l’ophtalmologue Koutseff mis à ma disposition par son fils Philippe ; tous me font aussi bénéficier de leurs récits nourris par de riches souvenirs ; ces éléments sont accompagnés et mis en valeur par d’inestimables trésors tirés de l’oubli : les articles extraits de la presse d’une Russie en exil, reflets fidèles d’une époque disparue ; c’est ainsi qu’avec l’aide de tous, j’ai pu composer ce deuxième livre.

Le voici à présent entre les mains du lecteur.

J’ai commencé à me passionner pour la photographie historique en 1994, lors de ma première visite à Tatiana Alexeevna Bakounine, à Sainte-Geneviève-des-Bois. Celle-ci me montra des cadres accrochés aux murs dont les visages ne me disaient absolument rien : Michel Andreevitch Ossorguine, un vieux portrait de Bakounine, le défunt poète Ivan Boldyreff… Et moi qui ne connaissais personne ! Curieux, puis intéressé, je fus alors très vite pris par la passion. Quelle épopée ! J’ai recherché Youri Mandelstam, Anatole Schteiger, d’autres aussi, disparus depuis longtemps. Puis j’ai rencontré Nathalie Borissovna Zaitzev-Sollogoub qui m’a ouvert ses archives.

Je n’oublierai jamais ma toute première découverte, aussitôt perdue : le cliché d’un émigré – un certain Tzygankoff – à son retour en France de je ne sais quelle colonie africaine. Il avait été photographié dans la rue alors qu’il embrassait son chien. J’adorais cette photo.

La seconde était un portrait de Fiodor Chaliapine que m’avait cédé André Savine, un bibliophile russe. Puis j’ai découvert quatre-vingts photographies de ballet ; je m’apprêtais même à en faire un livre sur le ballet russe, mais on me les a toutes volées dans ma voiture. Cela m’a donné un vrai coup de fouet : il fallait que je fasse des recherches, que je me consacre aux photos, que je les sauve. Pour créer plus tard, peut-être, un fonds russe sur le modèle des archives de Bakhmeteff à New York, cette fois exclusivement iconographique. Mais celles-là sont au-delà de l’Océan, alors que les photographies doivent demeurer ici, à Paris, dans le centre culturel de l’émigration russe.

Je suis intimement convaincu qu’aucun cliché n’est inintéressant. Même la photo de plage la plus commune, un peu travaillée et bien cadrée peut devenir une œuvre d’art. Pour commencer je me suis mis à étudier la technique de la restauration avec des moyens électroniques : le scanner et un logiciel spécial donnent de tels résultats qu’il y a un réel plaisir à voir renaître une vieille photographie toute estompée !

En Russie on retouche : pour moi, c’est une négation de la photo. Je ne retouche jamais. Je me contente d’enlever les égratignures et les dégradations extérieures. Peu à peu j’ai appris à faire le choix du bon papier chez l’imprimeur : il ne faut pas qu’il soit transparent car la photo se verrait à l’envers ni qu’il jaunisse avec le temps.

J’ai pour toutes les professions un véritable engouement. Mais malheureusement, je n’ai pas encore retrouvé les gardes-marine qui ont peint la tour Eiffel, ni aucun des Russes qui cultivaient du raifort dans le Bois de Boulogne. Je n’ai pas encore vu non plus les Russes qui ont porté une croix orthodoxe au sommet du mont Blanc. Pourtant il y en eut des légendes sur toutes ces personnes-là ! Il reste encore tant de choses à retrouver et à reconstituer. Quel dommage que les gens jettent leurs vieilles photos ! Ou qu’au contraire, il les conservent jusqu’à la dernière sans en rien partager, considérant qu’elles font partie de leur existence. Quel dommage encore qu’à la mort d’une personne seule, arrive une concierge indifférente qui jette tous les vieux papiers à la poubelle. Alors, tout est perdu.

Que reste-t-il encore à faire ? En premier lieu publier un album sur L’Art du portrait photographique militaire. C’est un sujet complètement neuf auquel je travaille avec Vitaly Joumenko. Alors réapparaîtront les officiers des Armées impériale et blanches. Leurs portraits lorsqu’ils sont publiés aujourd’hui en Russie sont affreux à faire peur. En second lieu, je prépare, avec la collaboration de Gérard Gorokhoff, un album de photos sur l’engagement du Corps expéditionnaire russe dans la  Première Guerre mondiale, sujet complètement inconnu en Russie.

Je commence aussi un travail sur Les Enfants de l’émigration russe. Qui étaient-ils ? Ils allaient en classe, se rencontraient dans des organisations de jeunesse. Que sont-ils devenus ? Savants, professeurs, écrivains, ingénieurs, ils ont atteint des positions sociales très élevées et ont travaillé dans diverses compagnies, jusqu’en Afrique. Bon nombre de familles vivent encore là-bas, par exemple celle de Pierre Cheremeteff, le directeur du conservatoire Rachmaninoff.

Le monde entier m’intéresse : je rassemble par exemple des photographies prises en Yougoslavie, que je serais très heureux de publier sous le titre Les Russes en Yougoslavie ; il existe en effet une masse de documents, surtout sur le corps des cadets et l’Institut de Kharkov. Plus tard je préparerai Les Corps de Cadets russes en exil et L’Émigration russe dans les Balkans. Il n’existe pas non plus d’album sur la Colombie, le Venezuela, le Brésil. Il y a tant de gens là-bas. Sans parler des États-Unis : c’est un de mes grands rêves de montrer ceux qui sont partis au-delà des mers pour fuir les Allemands et qui ont créé là-bas de nombreuses colonies, à San Francisco, à Los Angeles et à New York.
Quelle est la perle de ma collection ? C’est difficile à dire, j’aime tout. Il y a des clichés étonnants de corps de ballet, d’orchestres ou de magnifiques photos des Russes Blancs ayant pris part à la guerre d’Espagne.

La photographie soviétique, je l’ai toujours constaté, est inventée, imaginaire et fausse, alors que les photos de l’émigration ne mentent jamais, car elles n’eurent pas le besoin d’inventer. C’est cela qui m’a conquis en premier lieu.

Pour finir – le plus important – je suis profondément reconnaissant à tous ceux qui m’ont aidé. Le professeur Véronique Lossky a traduit le livre en français. René Clémenti-Bilinsky a vérifié toutes les notices françaises. L’historien Vitaly Joumenko m’a apporté et m’a aidé à déchiffrer un grand nombre de clichés.
La plus grande gratitude va à mes parents Tatiana Kapitonova et Alfred Korliakov.
Tous, généreusement et de façon parfaitement désintéressée, m’ont donné des conseils et confié leurs souvenirs. Ce livre est empli de leur savoir et de leur amour.

Un concours inestimable m’a été apporté par la princesse Roussoudane Amilakhvari, Vitaly Amoursky, Olga Guerké, la comtesse Marie Apraxine, Hélène Arjakovsky, Cyrille Arnstam, Sophie Aslanoff, la Bibliothèque Tourguéniev, Claude Bernès, Gérard Baudard, Lenny Borger, Geneviève Chalimoff, le Groupement des Cadets, Serge Choumoff, la comtesse Alexandra Chouvaloff, Pierre Danzas, Nicolas Douchkine, Nicolas Dronnikov, Rostislav Doboujinsky …, Alexandre Eltchaninoff, Tamara Felixoff, Nathalie Fiodorovsky, Daria Fessenko, Lenar Garaev, Hélène Gavel, V.Gatzenko, Tatiana Gladkova, Gérard Gorokhoff, Nathalie Grabar, Marina Grey-Denikine, Alexis Grigorieff, Michel Grigorovitch-Barsky, Basile Ginger, Nicolas Goukovitch, Véra Gultzgoff, Youri Goursky, Véra Iljine, Mariamna Jedrinsky, la comtesse Hélène Kapnist, Nicolas Kedroff, Oleg Kesselman, Ismail Hagondokoff, Alexis Christophoroff, Georges Kopiloff, Alik Khananié, Marina Koretzky, Alexis Korovine, Alexandre Krasnoholovy, Anne Kropotkine, Philippe Koutseff, Grégoire Lamsdorff-Galagane, Irina Lavroff, Irina Lebedeff, Alexandre Liapine, Marie Lifar, Alexandra Lopoukhine, Alice Laurent, la Librairie russe de Sialsky, Nadejda et Boris Lossky, Hélène Lyjina (Polouchina), Michèle Mahé, Cyrille Mardoukhaeff, Cyrille et Galina Makhroff, Anna Marly, Lev Mnoukhine, le Musée de la Police, le comte André Moussine-Pouchkine, Antoine Nivière, Dimitri Orekhoff, la comtesse Olga Osten-Sacken, Alexandre Otsolig, Michel Ozeretzkovsky, Rostislav Pashinsky, Serge Peltzer, Alexandra Pletnioff-Boutin, Anna Poustyntseva, la baronne Nina Rausch von Traubenberg, Barbara Rapponet, Daniel Roumanoff, Alexis Selesneff, Irina Seroff-Mamontoff …, la princesse Zinaïda Schakhovskoy, Tatiana Stchoutzkoy, Gabriel Simonoff, Sophie Smirnoff, Nicolas Spassky, Anne et Cyrille Staritzky, Tatiana Struve, André Schmemann, Wanda Soulima, Madame Tevachoff, Nicolas Tchernetzky, Ivan Tolstoï, Xenia Tripolitoff, le prince Alexandre Troubetzkoy, Georges Troubnikoff, Alexandre Vassiliev, Cyrille Vassilieff, Nicolas Wyrouboff, Dimitri Wychnegradsky, Vladimir Yaguello, YMCA-Press, Nathalie Zamtchaloff …, Nicolas Zavialoff, Nathalie Zaitzev-Sollogoub, et bien d’autres.

Andreï Korliakov

Emigration Russe en photos